vendredi 11 décembre 2009

Jeu de la conversation téléphonique (4)

La conversation de départ dont seule une moitié avait été livrée:



- Eric, c’est moi… le spectacle commence dans dix minutes. Je ne trouve pas l’entrée des artistes. Tu m’as bien dit que la porte était sur l’arrière ?
- Evidemment. Jamais devant.
- Ben là, je suis devant la porte jaune et elle est fermée.
- C’est l’autre.
- Quelle autre ? Il n’y a qu’une seule porte ici. Une porte jaune en métal.
- En bois.
- Mais elle est où ta porte en bois ?
- Entre la baie vitrée et l’escalier.
- Je crois que je vais passer par l’entrée principale.
- Ne fais pas ça, malheureux.
- Je sais, c’est l’heure où ils ferment les portes au public, mais je commence à avoir froid, moi. Quelle idée, aussi, d’accepter de te remplacer au pied levé…
- Je t’en suis vraiment redevable.
- Oui, je sais, Tarzan, c’est dur à jouer avec une jambe dans le plâtre… Mais ce costume n’est pas vraiment ce qu’on fait de mieux au mois de décembre.
- T’as pris le zèbre ?
- Non, la panthère, le slip en zèbre était mité.
- Il tire un peu sur les côtés.
- La prochaine fois, essaie de me refiler un rôle plus habillé… je ne sais pas, moi… Cheetah ? J’aurais l’impression de jouer « gare au gorille » plutôt que ta comédie musicale à la mords moi le..
- Quel rapport avec Brassens ?
- Je disais ça juste comme ça. Il faut que je me dépêche, là… Ah, voilà une porte en bois. C’est tout vert.
- A cette heure-ci, oui, c’est ouvert.
- Je parlais de la couleur. Attends… oui, c’est bon, elle s’ouvre. Et après ? Là, je suis devant un ascenseur. J’appuie sur quel bouton?
- Prends le deuxième… ou le troisième.
- Faudrait savoir. Quel étage ? J’appuie sur le « 2 ». J’espère que c’est bien le chemin vers les loges…
- L’éloge funèbre ?
- Très drôle ! Tu te rends compte que je vais rater le lever de rideau, perdu dans les méandres d’un théâtre minable de banlieue, avec seulement un slip de Tarzan sur le dos.
- Sur le dos ? Haha ha.
- J’ai l’impression que ça ne te contrarie qu’à moitié de ne pas jouer ce soir… Je me trompe ?
- Qu’à moitié, tu l’as dit. Ils sont là?
- Oui, je suis arrivé dans les coulisses. Il y a du bruit, la salle a l’air pleine… tu entends, derrière ?
- Non, rien. Ni derrière, ni devant.
- Ouh là là, ça y est, j’ai le trac…
- Ça monte, normal..
- T’as pas peur, toi, avant d’entrer en scène ?
- Des fois. Une question d’habitude. Mais ça dépend aussi du cadre, bien sûr.
- Ecoute, là, il va falloir raccrocher. Il y a déjà Josiane qui me fait des grands signes paniqués. Et puis Sylvain, le « metteur en chant », comme il dit lui même.
- Ca m’écœure !
- Tu y vas fort, après tout, c’est lui qui me fait bouffer ce mois-ci. Il a accepté tout de suite que je te remplace, quand même.
- Une vieille dette... qui m’a sauvé la vie.
- Quoiqu’il en soit, faut que je m’entraîne encore une fois à passer de liane en liane avec une seule main, parce que j’étais pas vraiment au point, à la générale…
- J’espère que les cintres sont solides ! Et le cri ?
- Aaaaaaayayaaaaaaaaa Yayayayaaaaaaaaaaaaaaa. Impressionnant, hein ?Avec un organe comme celui-là, ils voudront me garder, même après ton retour, fais gaffe ! Aaaaaaayayaaaaaaaaa Yayayayaaaaaaaaaaaaaaa.
- Trois heures, tout au plus. Mais tu me tires une belle épine du pied.
- Du plâtre, oui… haha ha. Allez, salut, vieux, je te rappelle demain pour te raconter.
- Merde !

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