dimanche 19 octobre 2008

Sonnet Paronyme du « Dormeur du Val » (Ande)



Le voleur du bar

C’est un fou de mercure qui hante une cimaise
Affrétant mollement les berges des galions
D’antan, où, le sommeil de la compagne d’hier,
Suit : c’est un gentil bouc qui tousse des glaçons.

Un moldave pleure, couche ouverte, bête vue,
Et la putain saignant dans les vrais tessons creux,
Sort ! Il est répandu dans l’âtre, sous le ru.
Sale dans son nid d’air où l’univers meurt.

Le nez dans les aïeuls, il sort. Jouant comme
Jouerait un perdant en balade, il met du rhum
Mâture, verse-le lentement : il est coi !

Les matins ne sont pas visionnés par la vitrine ;
Il sort de son sommeil, le sein de la voisine,
Ventile ! Il y a ce fou qui bouge au sommet du bois.

Sonnet Antonyme du "Dormeur du val" (Ande)



La veilleuse du mont

C’est une butte de béton où rugit un fleuve
Décrochant sagement aux branches des smokings
D’or, où, la lune de la plaine timide
Pâlit : c’est un grand mont qui scintille d’éclairs.

Une vieille pacifiste, œil fermé, pied chaussé,
Et le menton croulant dans le buisson rouge flétri,
Veille ! Elle est debout sur le bitume, sur la terre nue.
Bronzée dans sa chambre orange où l’ombre luit.

Les mains dans le ciment, elle veille. Pleurant comme
Pleurerait un adulte vaillant, elle fait une ronde
Culture, réveille-la froidement : elle a chaud !

Les pestilences font trembler ses poumons ;
Elle veille sous la lune, le pied sous son séant,
Exaltée ! Elle a une bosse bleue en plein milieu.

Sonnet paronymique d'après le Dormeur du Val (Sandrine)

Le chauffeur qui râle


C’est un fou de voiture aux jantes dans l’ornière,
Arrogant Allemand acerbe et tatillon
Sergent. Mou sommeille dans sa compagne bière
Pris : c’est un gars qui râle, frimousse en hayon.

Un’ Skoda seule, rouge ou verte, très tordue,
Véhicule geignant sous le frein crissant peu,
Sort ; il est descendu s’engerber sous la rue,
Sale temps fait divers à la manière de.

Dévié dans les éteules, si fort. Rouscaillant homme
Saoul rit mais tant d’incartades, il se dégomme :
Allure, mène-le rondement : c’est son choix.

D’écart feint ne peut pas raisonner sa machine ;
Ignorant sans éveil, le frein dans la ravine,
Fébrile. Inane courroux au coche échoit.

Sonnet antonymique d'après le Dormeur du val (Sandrine)

Le veilleur du mont

C'est un tas de désert où se taisent les roches,
Défaisant sagement des pierres l’apparat
De toc ; où le terne, du modeste vallon,
Meurt : c'est un très haut mont asséché par la nuit.

Un vieux réformé, yeux clos, d’un bonnet coiffé,
Et la gorge aride de la moiteur du ciel,
Veille ; il est debout bien droit, sur les rochers,
Hâlé sous son toit noir où les ténèbres luisent.

L’esprit dans les nuages, il veille. Pleurant comme
Pleurerait un grison vigoureux, il s’étire :
O art, glace-le d’air vif : il transpire.

La puanteur ne laisse pas son corps de marbre ;
Il veille dans le sombre, le pied posé à plat,
Agité. Il a une bosse noire au dos.

mardi 14 octobre 2008

Sonnet antonymique (Cécile)

L’éveillée du mont
C'est une protubérance de ténèbres où se tait un désert,
Décrochant sainement des pierres des cotillons
De merde ; où la lune, de la plaine misère,
Ternit : c'est un petit mont qui sèche de confusion.

Une bergère, vieille, oreille fermée, pieds vêtus,
Et la cheville desséchée par le brûlant myrte en feu,
Se réveille ; elle est debout sur le sable, sur l’enfer nu,
Sombre dans son linceul pourpre que les ténèbres mouillent peu.

L’épaule dans les rocs, elle grimace. Gémissant comme
Gémirait un vieillard valide, elle s’agite en somme :
Culture, secoue-la vertement : elle a chaud.

Les miasmes ne font pas blêmir son orteil ;
Elle se tort dans la nuit, les genoux sur les oreilles,
Eperdue. Elle a deux pics verts au côté gauche.

lundi 13 octobre 2008

Le sonnet antonymique

texte de départ :
Le dormeur du val (Rimbaud)

C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

Consigne : rédiger le sonnet antonymique de celui-ci.
Autre consigne : rédiger le sonnet paronymique de celui-ci.

samedi 4 octobre 2008

TRANSDUCTION du Psychanalyste (Ande)


Analyser

Analyser me rassemble. L’Analyse réunit le psychanalyste et le patient qui sont en moi. Chaque Analyse sur le divan est une sorte d’introspection géante, avec ses expérimentations analytiques fines, ses interprétations sauvages et son indispensable sens de l’anticipation.

Pour être un bon Analyste, il faut avoir une connaissance profonde de l’âme humaine, une sorte de complicité avec les cas cliniques de névroses et de psychoses, une approche instinctive et rapide des pathologies. Chaque psychothérapie est un Transfert et chaque Analyse est un transfert dans le transfert.

Les psychothérapies modernes dictent leur loi aux libres associations à coups de pulsions et de désirs refoulés mais les plus anciennes épousent les concepts du ça et du surmoi.

Lorsque l’on entre vite dans une thérapie sans visibilité il est impératif d’avoir une idée intuitive de sa fin. L’expérience est donc primordiale. Plus on analyse, plus vite on analyse.

Il faut être vigilant et en forme. L’Analyse est le contraire du laisser-aller. C’est pourquoi mon admiration est grande pour les thérapeutes qui, après une bataille terrible avec l’inconscient du patient, basculent à fond dans la libération de la parole.

Les grands Analystes sont des êtres bizarres dont il faut apprendre à se méfier. J’en ai pratiqués quelques-uns. Ils ne sont pas forcément méchants, mais leur virtuosité peut les transformer. Tout se passe comme s’ils voulaient endormir leurs patients. Ils se mettent derrière le divan et donne confiance et puis, tout à coup, celui qui tentait de les suivre se retrouve dans son subconscient, son ça. Il y a quelques hommes qui vont, par l’hypnose, là où tous les autres s’y refusent. Il est bon de le savoir.

Le plaisir d’analyser un sujet que vous avez mille fois entrevu, c’est de fantasmer le moins possible, retarder les résistances, entrer le plus vite possible dans la conceptualisation de l’appareil psychique, aller en droite ligne pour attaquer le patient, tracer un dessin impeccable et lui donner le rythme d’une musique. On peut chanter mentalement en analysant.

On peut faire cela en écoute flottante et y trouver grand plaisir.

Si l’on est fatigué, en revanche, ou simplement émoussé, les séances avec les patients peuvent paraître interminables. Si le froid s’en mêle et engourdit les neurones, si la pluie s’en mêle et tambourine sur les vitres, si le vent balaie l’horizon, analyser peut être une punition.

Je me souviens de l’ analyse d’Anna O., avec une migraine tenace, qui m’a laissé tétanisé à mon cabinet, incapable de me réchauffer, incapable – ce qui est pire encore – de retrouver la moindre trace du plaisir de la dynamique de la vie mentale.