vendredi 31 août 2012

Quatrine synesthésique (Cécile)


Quatrine
Acre âpreté de vomi dans la gorge
Griffée par une panthère Zorro
L’amande douce de la colle Cléopâtre est ici contradictoire
Imprimé dans l’oreille le ricanement des hyènes

Plein le nez de la fange de la France forte
Le bruit et l’odeur
Ça vous picote les doigts de tirer sur les croûtes qui
Fondent sous la langue comme un bonbon amer

Ça chatouille les doigts et je reste polie
Rétro-olfactive sur les papilles la francfort grasse
On n’entend plus rien que le silence, là, c’est fini,
Plus que le remugle de l’autodafé refroidi

La bouche a disparu muette enfin
Le nez a disparu mais pas les miasmes
Ça vous laisse un relent de poubelle derrière les dents jusqu’à la moitié du palais
Toutes ces scarifications caressantes

La quatrine est une n-ine de quatre strophes. Ici le sens de la vue disparait, pour écrire à partir d'une photo (pendant l'atelier retraitée en noir et blanc). Il est remplacé par les quatre autres sens.

jeudi 30 août 2012

Huitain combinatoire (Cécile, avec Dorothée)


Huitain combinatoire

Tube d’acier
Des grilles fermées prairie
Ruban rouge
Par les grandes lettres brunes vieillies
En enfilade le fatras
Peut forcer la grille floue un peu
Cadre extérieur jour
Par transparence qu’on ne traverse pas


La contrainte : pendant l'atelier de FF/ Hermance Triay, nous avons écrit un huitain combinatoire : chacune écrit un quatrain, puis le donne à sa partenaire, qui le complète d'un  autre quatrain intercalé; j'ai écrit les vers 2 4 6 8 en travaillant à partir de ma photo, Dorothée a écrit les vers 1 3 5 7 en s'inspirant de sa photo. Le résultat est un poème à quatre mains qui n'est pas une illustration de la photo, mais alors pas du tout. Et pourtant...

samedi 18 août 2012

« Madame » par Otto Dix (Sandrine)

 
http://www.vertetplume.com/blog/wp-content/uploads/2011/01/Otto-Dix-Leonie-1923.jpg
 
 
 
couvre-chef populaire    gouaille enrubannée  plume triste
 
bord large
 
chevelure défraichie   mèche terne     front veiné
 
sourcil épilé
 
basse-fosse myope   nez piqué    désir fangeux
 
vérole vénale
 
Souvenir d’Otto Dix
Sans fard voir
Et montrer
En vrai
La guerre enlaidit
Pour toujours
 
couleurs criardes    odeurs bruyantes   vétérans déshumanisés
 
peinture révolutionnaire

mercredi 1 août 2012

A supposer - photographie à l'aveugle (Sandrine)


A supposer qu’on me prie de vous décrire un cliché de mon cru, pris au hasard, il y a quelques instants, dans une rue commerçante du centre ville de Bourges – cité de la région Centre qui, au passage, mérite le détour, notamment pour ses constructions médiévales en pierres claires fort bien conservées, parmi lesquelles le Palais Jacques Cœur ou encore sa cathédrale Saint-Etienne que je qualifierais – et vous me passerez ce mot un tantinet éculé – de « joyau de l’art gothique » - si, donc, l’on me demandait de vous parler de cette photo, je commencerais par apporter une précision qui a tout de même son importance puisque ce qui suit est susceptible d’en décevoir certains parmi vous, je dirais donc avant toute chose – et ceci est une mise en garde – qu’il s’agit en réalité d’une photo que moi-même je n’ai pas encore vue et dont je ne saurais par conséquent garantir l’existence (car la consigne stipulait bien qu’il fallait refermer l’appareil sans ni avoir regardé dans le viseur, ni jeté un œil à l’écran) donc, pour en revenir à ce qui nous intéresse – ma photo, suivez un peu ! – je suppose qu’elle est traversée, oui, littéralement traversée par une dame assez âgée - que d’aucuns n’hésiteraient pas une seconde à appeler « petite vieille » tant il est  vrai que le respect est une denrée en voie d’extinction-, or cette personne, si je dis qu’elle doit « traverser » l’image, c’est que la photo a été prise en marchant, à hauteur de cabas – car je peux me vanter d’être plus grande que mon personnage d’une bonne dizaine de centimètres à vue de nez et que je tenais mon appareil aux alentours de ma hanche droite, soit quasi exactement, donc, à la hauteur de son coude replié pour caler son sac dans la montée – car, oui, j’ai oublié de préciser que la rue était en pente et que la dame de la photo la remontait tandis que moi, je déambulais en sens inverse - vers le bas de la ville, donc (grosso modo en direction de la gare pour ceux qui connaîtraient les lieux) en quête d’un motif pour cette photo « surprise » (entre guillemets, s’entend) à prendre sur le vif – mais nous en étions donc à son cabas calé dans son coude, pour pouvoir je crois tirer cette autre forme de panier, à roulettes, bien utile aux personnes âgées pour transporter des colis lourds, quoiqu’une idée me vienne en écrivant ces lignes et je m’en vais vous la confier : il se peut fort qu’eu égard au mouvement global de la scène – le sien ascendant, le mien descendant, à des vitesses différentes – nous nous soyons croisées sans que sa silhouette ne s’imprime dans le champ de la photo, auquel cas cette dernière figurerait alors un pan de rue pavée avec une banque ayant choisi un rongeur pour logo, éventuellement le pare-choc d’un bus qui arrivait là, mais aussi, je l’espère, au moins un coin d’imperméable ou de gilet crème sur une robe à fleurs dissimulant peut-être un bout de jambe gainée d’un bas de contention.