lundi 29 décembre 2014

L’Assoupi du ravin (Patrick)

Soit un coin foisonnant où mugit un canal,
Attachant sans raison aux gazons maints chiffons
D’airain ;  un falot, du piton cardinal,
Cuit. Soit un vallon où l’or fuit dru du plafond.

Un poulbot conscrit, tous crocs à l’air, sans gibus,
La toison tutoyant la batavia azur,
Dort ; il fait du grand champ son hamac, sous l’Airbus,
Blafard
 sur son pâquis où s’abat un jour pur.

Arpions dans un massif, il dort. Un air kif-kif
L’air d’un galopin mal fichu, il choit du pif :
Sans nul fard, ourdis-lui un chandail : un plus long.

L’iris ou l’arnica ont trahi son tarin ;
Il dort dans un lys blond, poing sur son pull marin,
Tout mou. Il a pris du plomb pas loin du colon.

(Rimbaud survivra à l’affront !)


Scribouillard (Patrick)


Il n’est pas bien malin le scribe qui dépeint
la scène avec ses mots : au feu d’une bougie
il éclaire un tableau, où l’or de sa vigie
fait danser sur la table une miche de pain,

un couteau, quelques noix, à l’ombre d’un lupin
qu’un gant noir met en vase. Une larme rougie,
– il la décrit carmin – a chuté, sans magie,
un peu sur le côté, semblable à l’escarpin
  
de Cendrillon fuyant, sur une clémentine
éclatée en quartiers qu’un insecte butine.
L’auteur se dit absent – et si l’auteur trichait ? – :

être un Autre est un jeu (ou le lait, le pot, l’anse),
il se grime en objet, en ombre ou en silence,
mais on voit son reflet dans l’étain du pichet.

lundi 24 mars 2014

LA PETITE CUILLERE (Estelle)



Contrainte : raconter une histoire du point de vue d’un objet.


Lundi : Je suis une petite cuillère à manche orange à pois blanc.
Et ce qui me calme ce sont les deux bains de mousse quotidiens que Mme Martin me donne car sa machine à laver est tombée en panne après avoir inondé le voisin du dessous.
Je flotte sous une écume blanche, scintillante et tiède.
Au fond de l’eau je discute avec les couverts mais j’évite les couteaux, ce sont de vieux dragueurs.
Je désire rester vierge et célibataire.
Lorsque l’on me rince et m’essuie, je reflète le nez proéminent de ma maîtresse, qui se mire en moi avant de me tremper rêveusement dans sa tasse à café.
Mardi : Elle oublie toujours de m’utiliser avec l’assiette à dessert orange à pois blancs et je me retrouve posée  près de l’assiette blanche à fleurs désuète de sa trisaïeule. Je n’ai rien à faire avec cette assiette ébréchée, pétard elle me fait suer l’ancienne ! Qu’elle retourne dans sa brocante !
Mercredi : je me suis fait une nouvelle relation, une petite cuillère à manche rose trouvée dans l’escalier.
Elle appartient au voisin du dessous.
Il fait la fête certaines nuits - lorsqu’il n’est pas inondé - et les basses nous empêchent de dormir. Du coup on n’a pas rendu ma copine à ce veau, « il n’a qu’à pas gueuler comme un veau », dit Mme Martin, « je ne lui rendrai pas sa cuillère ».
On discute dans le tiroir au milieu de la poussière et des miettes de pain.
Jeudi : Rémi m’a emmenée en pique-nique avec sa classe et la compote. La compote, une pote un peu molle est morte en fin d’après-midi dans la poubelle du square cernée par les moucherons, près d’une immonde pissotière.
Au moment de partir, Rémi m’a oubliée dans l’herbe, un limaçon a rampé sur ma robe orange en bavant et écumant.
Heureusement Carolina a lancé « elle est à qui cette cuillère verte à pois blancs ? (elle est daltonienne) » alors Rémi et un CE1 ont crié en même temps « à moi ! ».
Ils m’ont saisie chacun d’une côté et que je te tire et que je te pousse et m’ont cassée en deux.

Vendredi : Le père de Rémi m’a recollée et interdit de me tremper dans le pot de « cette cochonnerie de Nutella » avant  trois jours.
Samedi : Je trône sur le plan de travail debout dans un verre et on me fiche enfin la paix. Toutes mes copines subissent les assauts des couteaux dans le tiroir. Ceux-ci ont renoncé à sauter les fourchettes car elles ne se laissent par faire avec leurs cinq dents (environ, je ne sais pas compter). Les cuillères jeunes et graciles sont une proie facile pour ces imbéciles. Parfois les grosses cuillères en argent de l’aïeule interviennent pour nous protéger et leurs donnent un coup de boule. La louche s’y met aussi et laissez-moi vous dire que lorsqu’il y a de la soupe au menu, les violeurs se tiennent à carreau sur la nappe à carreaux.
Dimanche : J’ai regagné le tiroir et je sens bien à la façon qu’ont les autres de se ranger dos à moi, que je suis handicapée, ou au fait que Mme martin ne me sort plus lorsqu’elle a des invités. Le couteau à beurre a un manche sculpté en forme de grappe de raisin couvert d’une feuille de vigne, il est voluptueux de se frotter à lui. Il est toujours propre car ici on coupe le beurre avec un couteau lambda qui passe alors sa journée poisseux - bien fait - ça fait suer Mme Martin de récurer les couteaux. Je ne lui lâche plus la grappe au petit couteau à beurre étincelant qui m’accepte telle que je suis.


mardi 11 mars 2014

Demi-conversation téléphonique, version 1. (En gras, la partie qui était révélée, celle du jeune homme) par Estelle



Elle et lui, une vingtaine d’année
(Elle dans un bus, Lui chez lui)
Lui : C’est moi, passe me voir ce soir, ça va pas du tout, je débloque complètement je vois tout en noir en plus y’a plus d’électricité chez moi à cause de la tempête.
Elle : Chez toi à Saint-Marcel-Les-Valence ?
Lui : Oui s’il te plait,  j’ai été seul toute la journée je vais péter un câble ça fait une semaine que t’es pas venue…
Elle : Deux jours ! Ecoute Jacques tu commences à me gonfler j’avais un plan avec un copine pour aller au concert, Rémi m’invite à dormir chez lui et toi tu viens me proposer un troisième plan laisse-moi le temps de réfléchir!
Lui : Je commence à douter sérieusement de tes sentiments tu fais aucun effort pour que ça casse pas entre nous !
Elle : Qu’est-ce que tu veux casser, la dernière fois c’était la poubelle !
Lui : Ça va casser entre nous je te dis, qu’est-ce que ça te coûte de venir me voir !
Elle : 26 euros de train Lyon-Valence je ne sais pas si y’en a un ce soir et j’ai plus de thunes.
Lui : Parle plus fort je n’entends pas ce que tu dis.
Elle : Je suis dans le bus.
Lui : Avec Bruce, c’est qui Bruce l’autre con chez qui tu dois dormir ?
Elle : JE SUIS DANS LE BUS ET TOUT LE MONDE M’ENTEND !
Lui : Merde, je sens que je vais envoyer valdinguer ce téléphone.
Elle : Rappelle-moi quand tu seras calmé, s’il marche encore… attends y’a une fille en uniforme qui approche, elle fait une enquête…
Lui : Je suis innocent, c’est Louis qui a tout manigancé je suis resté dans la voiture ce soir là…
Elle : Une « enquête de satisfaction », je dois répondre à leurs questions et leur dire à quel point  j’adore les transports en commun …j’ai la voix cassée je suis malade qu’elles interrogent un autre passager, écoute Jaques je suis au bout du rouleau … Je n’ai pas la force de venir ce soir.
Lui : Tu te plains sans cesse d’être fatiguée c’est du cinoche.
Elle : Non et mon médecin pense que c’est lié à l’apnée.
Lui : Je t’avais dit d’arrêter ce sport.
Elle :… du sommeil pas du plongeur, suite à mon rendez-vous avec le pneumologue,  il a été décidé que je dorme avec un masque à air pulsé dont le nombre de décibels équivaut à celui d’une cour de récréation d’école primaire…
Lui : Tu as pensé à moi avec ton masque ?
Elle : Oui, il tient dans une valise.
Lui :   Tu peux pas t’en passer une nuit ?
Elle : Non ou tu nous acceptes mon masque et moi ou je ne viens pas.
Lui : Alors finalement ce n’est pas la  peine que tu viennes, je vais mieux…
Elle : Mais … c’est ça raccroche raccroche … quoi Madame j’ai le droit de téléphoner non ! Ah mon abonnement, je l’ai oublié chez moi…

lundi 3 mars 2014

Demi-conversation texte imposé de Sandrine Blanchard (en gras) Complété par Estelle FEUVRIER


-       Bonjour Madame, je me permets de vous rappeler au sujet de l’affaire…
-       Concernant mon opération de la mâchoire ?
-       C’est cela, avez-vous réfléchi ?
-       Ma foi, je n’ai pas le choix si je ne veux pas porter un dentier à cinquante ans et encore m’avez-vous fait comprendre, un dentier ne tiendrait même pas dans une mâchoire comme la mienne.
-       Un tout petit peu plus fort…
-       Je ne peux pas parler plus fort, je me suis coincé la mâchoire en mangeant une tartine.
-       Désormais les termes ont changé.
-       Oui vous m’aviez parlé d’une opération dans un délai de 15 au lieu de 18 mois…
-       C’est cela qu’avez-vous décidé ?
-       Aie, je viens de fissurer ma gouttière en fermant la bouche, elle est tombée sur le carrelage, je vous reprends dans deux secondes je ramasse les morceaux…
-       Certainement pas.
-       Vous préférez que mon mari la piétine en se faisant un pastis ?
-       C’est cela.
-       Bon je m’assois.
-       Je préfère aussi.
-       Au fait, le tableau que vous avez ramené du Cambodge où vous soignez et redressez les dents des enfants pauvres, trônera sur ma cheminée …
-       Seulement si cela rentre dans le cadre prévu…
-       Malheureusement le cadre prévu est tombé et s’est cassé, je dois en acheter un autre…
-       Ah bon ce n’est pourtant pas ce qui …
-       … s’est passé, si.  Je tremble et fais souvent tomber les objets. Au fait votre cabinet a été cambriolé, de quand date le méfait ?
-       Au mieux d’hier. Mais je ne suis pas spécialiste.
-       Il parait que les gouttières de vos patients ont disparu ainsi que les moulages de leurs dents ? vous devez être ennuyé…
-       Terriblement oui, d’ailleurs nos les avons eus…
-       Les cambrioleurs ! Qu’ont-ils besoin de voler des appareils dentaires ? vous êtes tout…
-       Retournés et plus vite que cela si je puis me permettre…
-       Plus vite vous retrouverez les bagues plus vite vous rouvrirez, en effet, ils pensaient peut être trouver des bagues en or et non les bagues en céramique que l’on fixe sur les dents irrégulières, sinon nous avons bien rendez-vous demain à 15 heures ? à votre deuxième cabinet…
-       Demain est un autre jour.
-       Demain et un autre jour, quel jour ? je ne l’ai pas noté, c’est qu’entre les rendez-vous avec l’ostéopathe de la mâchoire, la kiné de la mâchoire, le chirurgien maxillo-facial et vous, mon orthodontiste, c’est à se décrocher la mâchoire.
Vous allez enfin vous occuper de mes dents qui se déchaussent, j’espère ! Ou vous attendez qu’elles tombent d’elles même ! ? Ce sont des soins de quel ordre, demain ?
-       … particuliers, en quelque sorte.
-       Qu’entendez-vous par là, vous savez que vous n’êtes pas trop mon type docteur, en plus votre secrétaire n’est pas là le mercredi, je serai donc seule avec vous et vos moulages ? c’est …
-       C’est cela. Parfait. Au revoir.
-       Au revoir Mr Calisson, pardon Mr Pélisson. Chéri c’était Pélisson mon ortidontaste pardon mon orthodontiste.

samedi 1 mars 2014

Sautons la barrière (Sandrine)


Sautons la barrière…


Sautons la barrière dès le printemps venu
Verdir mon fol espoir de minceur ingénue
Je traverserai prés, prairies et champs de blé
De toi me languissant, vigueur sans bourrelet

Je courrai en jogging, grise basket au pied
Sans plus aucun muscle, mon abo résilié
A ce club de fitness où se sculptaient mes fesses
Mon fondement, que dis-je, je manque de sveltesse.

De graisses engoncé mon cuissot mal tourné
Toi d’antan si joli de sucres t’es veiné
Des capitons de gras te délivrerai lors
Venus, belle déesse, à qui je voue mon corps.

 ***

Contrainte: la textée suivante

Le titre est le début du premier vers.
C’est un poème en trois quatrains, en alexandrins et aux rimes alternées.
Le poète s’exprime à la 1ère personne du singulier.
1er quatrain :
Vers 1 et 2  (avec enjambement):
Le poète se prépare à une action qui rompt avec le quotidien et dont la date est fixée par une périphrase poétique à l’aide d’une couleur. Puis il tutoie un autre personnage qui est la raison de son action.
Vers 3
Le poète évoque les étapes de son action à travers une nature contrastée (au futur) mais décrite de façon assez vague et par une répétition.
Vers 4
Le quatrain se termine sur la nécessité de voir l’autre, (qu’il tutoie) dans un style soutenu.

2ème quatrain :
En une seule phrase, (et un passage au futur) le poète s’imagine déjà faire cette action, il évoque différentes parties de son corps et ses sens comme atrophiés.  Il finit par le fait qu’il confond les notions fondamentales à cause de sa tristesse.
3ème quatrain
Vers 9 et 10 par la métaphore impliquant une matière précieuse, il évoque des paysages nocturnes et diurnes qu’il refusera de voir à cause de sa mélancolie.

Vers 11
Voyant déjà l’aboutissement de son action et le lieu exigu où réside l’autre personne, il évoque les deux présents qu’il lui fera en lien avec la nature et son renouveau.












vendredi 28 février 2014

Textée d'Estelle (Cécile)



Tu vas voir ce que tu vas voir, je vais t'en faire
voir de la série noire, et dès demain, tiens.
Je t'en ferai, de grands petits mini bouts d'fer
ô chère ô douce que dans tes bras je deviens

Mains, bras, jambes, sexes inertes tout est de fer
et tout en toi me trouble me hante et revient
en vague le désir de briser, de défaire
ton corps mignon, de barder de fer tes beaux seins.

Je souffre affreusement, or ne me manquent
Ni l'or du soir qui tombe en dorant le conin
ni le jour dans l'alcôve où tu joues un enfer
Voici pour oreiller des fruits en or, non faint.

(le texte source de la textée sera rendu public quand tout le monde aura rendu sa copie)

Demi-conversation 1. (Cécile)


Sur une idée d'Estelle.

Elle et lui, une vingtaine d’années
Lui : C’est moi, passe me voir ce soir, ça va pas du tout, je débloque complètement je vois tout en noir en plus y’a plus d’électricité chez moi à cause de la tempête.
- Je peux vous proposer une offre « dolce vita », et un dépannage hors forfait après 17h, jours fériés inclus, veuillez prendre rendez-vous avec l'un de nos agents.
-Oui, s’il te plait, j’ai été seul toute la journée je vais péter un câble ça fait une semaine que t’es pas venue…
-Vous avez souscrit une offre Dolce Vita et pris l'option « huit et demi », aussi nous avons le plaisir de vous proposer un rendez-vous hors forfait et libre de tout engagement.
-Je commence à douter sérieusement de tes sentiments tu fais aucun effort pour que ça casse pas entre nous !
-Je n'ai pas compris votre réponse, veuillez appuyer sur la touche étoile pour revenir au menu, ou accédez au menu cinéma à la demande en actionnant la touche dièse.
-Ca va casser entre nous je te dis, qu’est-ce que ça te coûte de venir me voir !
-Pour « la philosophie dans le couloir », appuyez sur la touche 1.
-Parle plus fort je n’entends pas ce que tu dis.
-Pour  « Huit semaines et demi », appuyez sur la touche deux. Pour « la revanche d'une rousse », appuyez sur la touche 3.
-Avec Bruce, c’est qui Bruce l’autre con chez qui tu dois dormir ?
-Pour « Trois doigts à Izmir », appuyez sur la touche 4.
-Merde, je sens que je vais envoyer valdinguer ce téléphone.
-Désolée, je n'ai pas compris. Veuillez reformuler votre demande.
-Je suis innocent, c’est Louis qui a tout manigancé je suis resté dans la voiture ce soir-là…
-Vous avez demandé « Ma fourrure c'est de l'alpaga ». Ce film n'est plus disponible à la demande.
-Tu te plains sans cesse d’être fatiguée c’est du cinoche.
-Pour « Au secours j'ai perdu les mioches », appuyez sur la touche 5. Attention, ce film n'est disponible qu'en version chinoise.
-Je t’avais dit d’arrêter ce sport.
-Pour les chaines « sport », « hockey », « curling », veuillez contacter notre agent commercial.
-Tu as pensé à moi avec ton masque ?
-De catch? Oh. Tu m'as reconnue. Tu sais, la voix métallique, c'est mon masque de fer à moi, hein.
-Tu peux pas t’en passer une nuit ?
-Non. Le masque de fer... sous des doigts de velours. C'est doux tu sais...
-Alors finalement ce n’est pas la peine que tu viennes, je vais mieux…
-Tu ne veux pas regarder « Trois doigts à Izmir avec moi » alors ?

mercredi 26 février 2014

La demi-conversation (Sandrine)






Le jeu commence par la rédaction d'une moitié de conversation téléphonique. Le joueur 1 l'écrit en tentant que les répliques soient le plus polysémiques possible (ici, ce sont les répliques en gras, suggérées par Estelle). Le joueur 1 soumet alors son texte aux autres joueurs qui imaginent l'autre moitié possible de la conversation, soit ce que dit l'interlocuteur au téléphone. 



-         Salut ! C’est moi ! Désolé de te déranger en pleine nuit, mais ça y est ! J’ai enfin trouvé le moyen de révolutionner l’alexandrin !


-         Tu es malade !


-         Pas du tout ! Je viens d’inventer l’alexandrin… à douze syllabes et demi !!


-         Ça va faire du bruit.


-         Tu l’as dit ! Une sorte de deuxième révolution copernicienne, je te jure ! Si avec ça j’ai pas mérité mon habit vert…


-         Vert ?


-         De l’Académie, tiens ! Ecoute un peu cette merveille : « C’est ton propre flambeau que tu vi-ens de souffler »


-         Il est brillant…


-         Et comment ! Semi-diérèse du « i » … des mois que j’y travaille. Je vais enfin pouvoir présenter ma trouvaille au Docteur Bénabou.


-         Quand passes-tu à table ?


-         Pour l’instant, sa secrétaire me dit qu’il est très occupé. Ah, je suis pressé de lui tirer des larmes avec mon petit truc en plus…


-         Ah, le pied…


-         … le demi-pied ! Dis, pour être sûr, le Docteur Bénabou, sur la photo dans ton bureau, c’est bien celui habillé en Schtroumpf ?


-         C’est ça, c’est le bleu.


-         Formidable ! Au fait, s’il me coopte à l’Oulipo, faudra reparler de tes honoraires..


-         Je les double.


-         Tu plaisantes ? Et si je refuse la multiplication par deux ?


-         Trois.


-         Quoi ? Tu les triples ? Mais ça ne va pas la tête ? Demande-moi de vendre mon génie au grand Capital, pendant que tu y es…


-         Mon trésor.


-         Ah n’essaie pas de m’amadouer. Tu ferais mieux de réfléchir à qui on demandera de rédiger la préface de mon « Anthologie de la poésie classique désaxée » quand les éditeurs se l’arracheront. Une grande plume…


-         Je cherche, je ne fais que cela.


-         Oui bah pour l’instant, tu ne m’as pas tellement soutenu. Si ça ne tenait qu’à toi, l’alexandrin de douze pieds et demi, on l’attendrait toujours. Pareil pour la comédie en deux actes ou la métaphore sans…


-         Là tu pousses.



-         Pardonne-moi. Je suis tellement excité d’avoir mis le doigt sur quelque chose de si énorme. Pourvu que le Docteur Bénabou me reçoive avant qu’un autre ait l’idée, sinon c’est, c’est…


-         C’est le cirque.


-         Exactement !


-         Je dois raccrocher.


-         Attends, je ne t’ai pas encore parlé de mon octosyllabe à sept pieds… allô ? allô ?