mercredi 7 janvier 2009

Homophonies approximatives (Sandrine)



Encore un clavecin... qui réunit Caradec, Proust... et Gainsbourg.


Retrouvé dans les archives de l’INA, ce presque vrai enregistrement inédit d’une presque vraie interview presque accordée en 1983 par Serge Gainsbourg à Roger Gicquel… et qui ne fut jamais diffusée.

Roger Gicquel : Serge, merci de nous recevoir, je sais combien la préparation de votre prochain Olympia vous accapare…

Serge Gainsbourg : Le temps, je le fuis, Roger, en noceur.

RG : Avec tous ces excès, ne craignez-vous donc pas la chute, le point de non-retour ?

SG (rêveur): … Sombrant dans le puits bouché des bonnes mœurs.

RG : Parlez-nous de celui que l’on qualifie parfois de « votre maître en désinvolture », Charles
Trénet… quand avez-vous fait connaissance?

SG (rit): Au temps de son pis gonflé de liqueur.

RG (outré) : Enfin, Serge! On m’a dit que vous aviez passé de longs moments ensemble, dans les casinos notamment. Aimez-vous toujours la roulette et le Black Jack?

SG (se lève, en colère): Bon sang, jeux d’ennui fauché… de voleurs.

RG : Je ne voulais pas vous froisser... Revenons-en à l’art. Que diriez-vous à votre fille Charlotte, si elle écoutait du Charles Trenet ?

SG : Entends, le vieux bruite caché par l’odeur.

RG : Oh ! (il fait une courte pause) Et Johnny Halliday ? S’il vous le demandait, pourriez-vous lui écrire une chanson ? Ou bien avez-vous aussi une dent contre Johnny ?

SG : Longue dent ! Ce n’est qu’un boucher, un rocker.

RG : Ne lui enviez-vous donc pas toutes ses admiratrices, qui s’évanouissent à son arrivée sur scène ?

SG (lui coupe la parole, marmonne): … tombant de ce cri poussé de torpeur !

RG : Vous ne pensez donc pas que la musique de Johnny adoucisse les mœurs ?

SG : L’onguent de ce bruit moucheté pour bonne sœur ?

RG (gêné) : Euh… Et votre public à vous ? Quelle impression cela vous fait-il de chanter devant une salle comble ?

SG (il sourit): Content. Tous ces cris gloussés, quel honneur !

RG (rayonnant) : Ah ! Donc c’est un Gainsbourg heureux qui regagne la loge après le spectacle…

SG (de nouveau sombre): Pourtant, le « je » suit, couperet du bonheur…

RG (paternel): Serge, ne noircissez pas le tableau à dessein. Quelles sont donc vos sources de plaisir ?

SG (il hésite) : D’antan je me suis touché de bonheur…

RG (l’interrompt) : Je songeais plutôt à des émois… artistiques ! Tenez : vous avez bien connu Simone Signoret et son mari Yves…

SG (perdu dans ses pensées) : … Montand, en mon lit ronflait en sonneur…

RG (perdant patience) : Mais non, parlez-nous de… je ne sais pas, moi… de vos discussions au coin du feu...

SG (toujours mélancolique): L’auvent par la suie rongé, en hauteur… Tourments, par la pluie douchés… ramoneur…

RG (à son assistant): Laisse tomber, ça ne sert à rien. Ramène-le à son hôtel, il faut qu’il se repose…

SG : Longtemps, je me suis couché de bonne heure…

RG : Et arrête ce magnéto !

1 commentaire:

Cid Larsen a dit…

J'adore! Merci pour cet éclat de rire matinal!

Cid d'ici.